8. LE REGARD MATERNEL

Selon la légende, Méduse aurait été une belle jeune fille trop fière de sa chevelure. Pour la punir, Athéna l'aurait transformée en gorgone. Ses cheveux deviennent des serpents et désormais son regard pétrifie tous ceux qu'elle croise. Aussi repoussante qu'elle fût Méduse n'en eut pas moins pour amant Poseidon.
  
C'est pourquoi lorsque Persée lui tranche la tête d'un seul coup de serpe, à sa grande surprise, Pégase le cheval ailé, jaillit de son corps décapité.

 

Pendant longtemps j'ai gardé  affichée au dessus de mon plan de travail, pour me surveiller, Méduse, la gorgone du Caravaggio. 

Appliquée comme une petite fille à donner de la vie à des corps inlassablement entravés sous ce regard pétrifiant au dessus de ma tête.



Est-ce parce qu'il est celui que j'ai croisé au sortir de l'oeuf, écrouée sous ses jambes, qu'il demeure somme toute celui dont j'ai toujours eu besoin, quand bien même je l'aurais préféré différent?  

Il m'aurait peut-être rendue différente de ce que je suis restée et j'aurais mis ailleurs une curieuse énergie consacrée à libérer des corps.

 


Cette pièce, d'une hauteur de 46 cms, a été pour moi techniquement difficile à réaliser. 

J'ai donné un centre de gravité à la gorgone volontairement instable: elle penche de tout son poids vers l'arrière: ce sont les genoux qui supportent  seuls ce déséquilibre comme quand on skie dans la poudreuse.

 
Plusieurs fois quand je me remettais au travail le lendemain je découvrais qu'ils s'étaient fissurés ou qu'ils avaient complètement cédé. 


La terre mère est si lourde. De face cela m'apparaît pas, mais c'est toujours comme ça chez ceux qui sont campés sur la force: ils ne vont pas forcément de l'avant.

 

Et moi en dessous je malaxe, je pose des étayages successifs jusqu'à ce que la terre soit suffisamment dure, le corps totalement rigidifié pour tenir en équilibre

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